Note de breffage|Effets potentiels de l’ingestion d’eau potable contenant de l’amiante : une synthèse des connaissances de l’INSPQ

by | Apr 9, 2025 | General, Uncategorized

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Références : Brisson, I.-J., & Parenteau, N. (2024). Fibres d’amiante dans l’eau potable : effets sur la santé et valeurs guides disponibles – Synthèse rapide des connaissances : revue narrative systématisée . Institut national de santé publique du Québec.

www.inspq.qc.ca

En bref

  • Le Règlement sur la qualité de l’eau potable du Québec ne prévoit aucune norme concernant la concentration d’amiante acceptable sans risque pour la santé. 
  • Les données toxicologiques et épidémiologiques actuelles sont insuffisantes pour établir un lien causal entre l’ingestion de fibres d’amiante et des cancers digestifs. 
  • Malgré l’incertitude scientifique, certains signaux dans la littérature suggèrent une association possible avec des cancers gastro-intestinaux. 
  • Les valeurs guides sanitaires disponibles sont basées sur une étude animale de 1985 comportant d’importantes limites méthodologiques. 
  • Trois recommandations sont proposées : développement de méthodes analytiques, surveillance environnementale et approfondissement de la recherche épidémiologique. 

Contexte

Le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP) a mandaté l’INSPQ pour produire une synthèse rapide des connaissances disponibles sur les effets de l’ingestion d’amiante dans l’eau potable. Ce mandat s’inscrit dans un contexte réglementaire où ni le Québec, ni Santé Canada ne recommandent de concentration maximale admissible. Cette synthèse vise à soutenir l’interprétation des résultats de surveillance et à éclairer les décideurs quant à l’éventualité d’un encadrement réglementaire. 

Résultats

  • L’ensemble des données ne permet pas de conclure à une relation dose-réponse, ni d’établir un seuil de risque sanitaire clair. Santé Canada ne recommande donc aucune norme à ce jour. 
  • Les bases de données humaine et animale comportent plusieurs limites et les associations apparentes dans certaines études pourraient être le fruit du hasard ou d’autres facteurs de risques non pris en compte. 
  • Les seules valeurs guides sanitaires disponibles proposent deux seuils basés sur la même étude animale, soit :  

– 7 MFL1 (fibres de plus de 10 μm) pour les effets cancérigènes (U.S. EPA2 – É-U).

– 2400 MFL pour les effets non cancérigènes sur le système rénal (OEHHA3 – É-U).

  • Ces valeurs reposent sur une étude de 1985 avec des limites et des incertitudes importantes.  
  • D’autres valeurs proposées ont été extrapolées à partir d’études portant sur l’inhalation de fibres en milieu de travail, mais celles-ci comportaient des limites majeures.   
  • Toxicocinétique : La majorité des fibres ingérées sont excrétées dans les 48 heures, mais certaines données suggèrent une faible absorption intestinale, permettant potentiellement leur distribution vers divers tissus. 

Méthodologie

  • Les résultats reposent sur une recherche documentaire systématisée de la littérature grise : 34 publications analysées et soumises à une évaluation de la qualité. 
  • La recherche excluait la littérature scientifique primaire. 
  • La majorité des études incluses sont de nature écologique, avec des données anciennes et des limites méthodologiques qui nuisent à l’estimation précise des expositions, ne permettant pas d’estimer précisément l’exposition individuelle et de conclure un lien de causalité.  

Recommandations des auteurs 

  1. Développer une méthode analytique harmonisée pour la détection des fibres d’amiante dans l’eau potable. 
  1. Mettre en place une surveillance environnementale ciblée permettant de mieux caractériser l’occurrence des fibres (leur type, longueur et source), leur répartition géographique et les populations exposées. 
  1. Renforcer la recherche épidémiologique et toxicocinétique incluant des études mécanistiques, afin de réduire les incertitudes actuelles et d’évaluer la pertinence d’établir des valeurs guides pour l’eau potable. 

Conclusion

L’incertitude scientifique entourant les effets de l’ingestion d’amiante ne doit pas être interprétée comme une absence de risque. Les signaux évoquant une association avec certains cancers gastro-intestinaux justifient une vigilance accrue et une bonification des efforts de surveillance et de recherche. En l’absence de normes claires, il est essentiel d’agir de manière proactive pour prévenir des expositions potentiellement préoccupantes. 

Julien Le Beller

Conseiller en recherche

Mars 2025

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